Étourderie en situation professionnelle : ce qu’elle révèle et comment l’éviter

Au boulot, l’étourderie, c’est un sport national : mauvais mail, pièce jointe oubliée, rendez-vous zappé… Pas de panique, vous n’êtes pas seul·e. Découvrez pourquoi ces ratés pros arrivent — et surtout, comment les éliminer avec des solutions simples, efficaces, et sans prise de tête. Prêt·e à dompter votre cerveau ? Suivez le guide.

Vous aussi, vous en avez marre de vivre dans la crainte de faire un faux pas ? J’ai développé une telle paranoïa à l’idée de commettre une étourderie que je vérifie désormais trois fois le destinataire avant d’appuyer sur “envoyer”— et je ne parle même pas de mes pièces jointes. Combien de fois, déjà, avons-nous tous cliqué avec assurance sur “envoyer”, le cœur léger, avant de réaliser que la pièce jointe s’était fait la malle ?

Erreur d’inattention, distraction, étourderie : ces petites trahisons du quotidien professionnel, qu’on préfère taire par pudeur, sont si fréquentes qu’on finirait par croire qu’elles font partie intégrante de notre fiche de poste. Sauf qu’elles en disent long. Et pas seulement sur notre niveau de caféine.

Les étourderies sont des signaux faibles… très bruyants

On les minimise souvent : “c’est pas grand-chose”, “je suis juste fatigué·e”, “je fais mille trucs à la fois”. Mais derrière la petite boulette de surface se cache souvent un vrai court-circuit mental.

Certains invoqueront le TDAH — et parfois à juste titre. Mais s’en remettre systématiquement à un diagnostic (réel ou auto-attribué) ne nous avance pas forcément, surtout que, quoiqu’on en pense, ce phénomène peut toucher tout le monde.

L’étourderie, ce n’est pas une tare morale, ni une preuve irréfutable d’incompétence. C’est un message. Un petit clignotant cognitif qui nous dit que quelque chose cloche : surcharge, automatisme, manque de présence, tension mal digérée ou surconcentration ailleurs. Le drame, c’est qu’on a tendance à interpréter ces ratés comme un déficit personnel plutôt que comme un symptôme structurel. Alors que, souvent, c’est notre cerveau qui essaie juste de faire de son mieux avec un script pourri.

Système 1, système 2 : quand Kahneman s’invite à la machine à café

Ah, Daniel Kahneman. Prix Nobel, penseur fétiche des RH qui se prennent pour des neuroscientifiques. Mais trêve de sarcasme : son duo système 1 / système 2 reste un outil redoutable pour comprendre pourquoi on se plante avec panache.

Le système 1, c’est votre mode mental automatique : il fonce, reconnaît des schémas, vous permet de lire ce texte sans effort. Rapide, intuitif, paresseux, il adore les automatismes et déteste les complications. Le système 2, lui, c’est le mode réflexion profonde : il ralentit, planifie, vérifie. Lent, coûteux en énergie, mais diablement rigoureux.

Le hic, c’est que dans notre quotidien pro, le système 1 est souvent au volant. C’est lui qui vous fait cliquer sur “envoyer” sans vérifier la pièce jointe, qui répond au mauvais canal Slack, qui envoie le mail pro avec votre signature Tinder. Pas parce que vous êtes négligent·e, mais parce que vous avez appris à fonctionner vite, tout le temps. Le système 2, lui, est fatigué. Il consomme trop d’énergie. Il prend des pauses pendant les réunions Teams.

L’illusion de la maîtrise : quand on confond vitesse et efficacité

Le monde professionnel adore les gens “réactifs”, “agiles”, “multitâches”. C’est-à-dire des gens qui sollicitent leur système 1 jusqu’à l’épuisement. Résultat : la vigilance s’effrite, l’attention se désintègre et les erreurs deviennent inévitables.

Mais l’étourderie, ce n’est pas de la paresse. C’est le coût cognitif du toujours-plus-rapide. On veut gérer, enchaîner, traiter. On oublie de penser. Littéralement. C’est le moment où l’humain se transforme en opérateur de process, jusqu’au bug fatal.

Comment on contre-attaque ?

On ne va pas vous vendre ici une application miracle pour “booster votre concentration en 3 minutes par jour”. Vous avez sans doute déjà trop d’applis. Et votre système 2 mérite mieux qu’une notification push.

On peut et on doit ralentir comme je l’explique mieux dans ce mon petit guide sur le slow work. Pas dans le sens d’aller moins vite : dans le sens de remettre un peu de conscience dans le bazar. Voici quelques pistes :

Remettre un peu de conscience pour vaincre les étourderies

Remettre un peu de conscience pour vaincre les étourderies
  • Ritualiser les tâches critiques : ne pas faire confiance à votre mémoire quand il s’agit d’envoyer un document stratégique. Ayez une checklist. Ce n’est pas infantile, c’est professionnel. Les pilotes d’avion en ont une, vous pouvez aussi.
  • Bloquer les moments à cerveau lent : créer des espaces où votre système 2 peut travailler sans être interrompu toutes les 6 minutes. Traduction : pas d’email pendant que vous préparez un compte-rendu sensible. Pas de Slack. Pas de réunions d’équipe. Oui, ça implique de poser des limites.
  • Repérer vos moments à risque : fin de journée, veille de deadline, fatigue post-déjeuner… on a tous des créneaux à haut potentiel d’étourderie. Ne planifiez pas les trucs importants à ces moments-là.
  • Dédramatiser sans banaliser : l’erreur arrive. Mais elle n’est ni une honte ni un détail. On s’excuse, on analyse, on ajuste. Et on ne s’auto-flagelle pas pendant 3 jours!

Je ne dis pas que j’ai trouvé la recette magique, mais depuis que je m’y colle sérieusement — un peu à contrecœur au début, soyons honnête — je perds moins de pièces jointes, et ma boîte mail me paraît nettement moins piégée (comme quoi, le système 2, quand on l’invite gentiment, finit par venir.)

Conclusion pour ceux qui lisent en diagonale (et ratent les pièces jointes)

L’étourderie, ce n’est pas un vice, ni un bug de fabrication. C’est juste ce qui arrive quand votre cerveau surchauffe, que le mode automatique prend les commandes et que vous validez un truc sans l’avoir vraiment lu.. Ce n’est pas grave. C’est fréquent et c’est même assez logique.

Kahneman nous rappelle qu’on a deux façons de penser pour le prix d’une : une qui fonce, une qui vérifie. Devinez laquelle on épuise en premier ?

Donc non, vous n’êtes pas “tête en l’air”. Vous êtes juste en train de faire tourner un logiciel complexe, avec trop d’onglets ouverts et pas assez de bande passante. Fermez-en un ou deux. Respirez. Revenez dans la pièce. Et si vous devez vraiment envoyer un fichier… vérifiez la pièce jointe. Deux fois.

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